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IKARIA

Ikaria

De face-surplomb

 

 

Parce-que nous héritons d’une déconstruction, d’abord, il y a La Ruine.

Une ruine sous ciel de lait et lumière de zénith.

Comme une cicatrice sur la peau de l’île,

ici, La Ruine se nomme Toula.

Mémoire en creux d’un combat oublié,

Toula raconte l’histoire d’une résistance.

Résistance au sommeil tiède du divertissement et du loisir obligé,

Résistance à la logique cannibale du carnaval totalisé.

Ici, d’Icare à Toula,

sous ce ciel de lait et lumière de zénith,

Toutes les résistances ont toujours pris la forme d’un aveuglement.

Il a toujours fallu changer les regards, désaxer les points de vue, voir autrement, voir mieux.

Entre le dedans et le dehors,

Par dessus et par dessous,

de face et en surplomb.

Aujourd’hui, comme en des temps immémoriaux,

il va falloir se dégager du piège horizontal du labyrinthe,

qui enferme le réel dans la mesure de la seule marche.

Il va falloir brûler l’évidence tyrannique de l’oeil inquisiteur,

qui traque et creuse le monde en profondeur,

à la recherche des certitudes hypnotiques du visible.

Il va falloir sortir de la fascination du cadre et de ses exhibitions.

Il a fallu. Il va falloir. Il faudra bien,

inventer une autre façon de voir.

Hier, aux heures de victoire de Toula,

Les regards étaient cadrés par une certaine façon de tenir un visible frontal.

« Caméra obscura » à l’heure du bonheur hypnotisé :

Azur, Nature.

Corridors sans ciel, troués sur l’illusion du « bien être » :

Immobilité, Silence.

Le regard résistant interrogera tout d’abord les frontières du cadre.

A coups de marteau, puis de lourdes masses,

Il veut voir ce qui se prolonge au-dehors, derrière les contraintes de façade.

Le mur tombe, la fenêtre se défait, la composition se désorganise.

Azur abîmé, Immobilité troublée,

Dans le cadre défoncé, la ruine s’observe elle-même, de l’intérieur.

Et le silence se fait assourdissant.

Brutalement, les hiérarchies du visible se désorganisent.

L’envers et l’endroit, le haut et le bas, le plein et le creux,

deviennent autant d’angles de vues possibles,

qui revisitent les axes du vrai et du faux.

Alors, le regard s’aventure.

Il traverse le seuil de l’exhibition, cherche ce que le cadre rate.

En modifiant l’axe, du frontal au surplomb,

le point de vue s’ouvre sur l’au-delà du voir, vers un concevoir d’un nouveau genre.

Du microscopique au macroscopique,

Le point de vue aérien de l’oiseau tombe autant du ciel, qu’il rase le territoire,

Accélère et ralenti, envisage l’infini, ou serre le détail.

Regard de texture, qui abandonne la profondeur au profit des épaisseurs,

Qui interroge les surfaces plutôt que d’illusionner les plans.

L’oeil nomade comprend tout à coup qu’il s’est élevé au-dessus du labyrinthe.

Alors, l’image change de stratégie,

elle n’est plus une simple projection.

La clareté ne la cogne plus de face, elle l’a traverse.

Le visible se fait aveuglant,

Et ce n’est plus le spectateur qui regarde le cadre,

Mais l’image qui scrute le spectateur.

Trou béant de luminosité, épanoui en direction de tous les invisibles possibles,

Tendu vers ce qui se refuse à être circonscrit,

L’incadrable nous envisage.

Et, si ce nouvel Icare plonge,

Par son regard inédit,

Enfin, et jusqu’à nouvel ordre,

Nous rêverons peut-être de tenir le labyrinthe en respect…

 

 

 

Pour le regard d’Isa, carnets de Stéphanie-extraits

Ikaria, 2010 Stéphanie Katz

Hôtel TOULA

Ile d'Ikaria, Grèce - août 2010

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