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Trop de peau
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Il fallait trouver un rituel pour accéder au mythe du corps, le mythe de sa jouissance maximale avant qu’il ne soit plus visible, plus désirable. Sinon c’était perdu, le corps devait jouir, c’était comme ça. Moi, je n’ai jamais adhéré aux formes de genre imposées par les yeux du monde, à celles que nos corps devraient représenter. Pas plus qu’à cette peau qui les constitue d’ailleurs et qui révèle leur contour.

Alors j’ai commencé par vouloir remodeler le corps.
Je l’ai donc empoigné par sa peau, par sa chair, comme on attrape un animal sauvage après une traque interminable, avec une forme de brutalité, de sauvagerie, d’épuisement. Sans relâche j’ai malaxé, manipulé, maltraité cette peau. Je l’ai pétrie comme on pétrit la pâte pour le pain. Je voulais que quelque chose de bon sorte d’en dessous cette peau, que quelque chose de désirable apparaisse.
Le contour du corps s’est mis à changer, les organes, la graisse, les muscles se sont déplacés, ça devenait effrayant. La surface de la peau révélait un rouge orangé angoissant. Elle portait les stigmates de l’affrontement qui avait eu lieu entre les mains, soumises à la tête, et la chair du dos et du ventre qui, elle, ne voulait pas obéir à la conscience. J’ai voulu l’arracher la peau, en changer.

Alors je me suis perdue dans cette répétition de gestes, encore et encore, semblable à une automate ou à une chamane, comme quelqu’un qui dialoguerait avec des formes beaucoup plus invisibles et qui pourrait réaliser mon désir de changer de peau. À force ou avec force, la répétition de ces gesticulations est venue supplanter le mal-être vivant sous cette peau souple et élastique qui encercle ce que les autres appellent moi, toi, quand iels me voient.

Comme si c’était possible de faire ça... J’y ai cru à cette solution. Les images de cet effondrement sont là.

Alors en dernier recours, j’ai voulu sauver ma peau. Je l’ai triturée avec encore plus de force pour que la douleur s’expulse d’en dessous, qu’on la voie cette douleur, qu’elle explose à la face des autres, qu’iels voient le pus sortir là sur les images, qu’iels voient sortir la souffrance accumulée depuis toujours par tous les pores de cette peau. Et la peau, libérée, s’est mise à se répandre, sans fin...

Il y a eu du chagrin à ne pas comprendre son développement exubérant. C’était trop. J’aimerais que ce chagrin s’en aille, qu’il dégage de ma tête pour la laisser exister cette peau, même seule, sans moi. De toutes façons, si elle suivait les lignes qui mènent à l’origine de sa colère, elle devrait donner plus à voir, plus à montrer. Et puis elle parle malgré moi depuis longtemps, bien avant cette tentative de rapprochement entre elle et moi. Avant tout ça, la douleur n’avait pas été autorisée à se montrer sinon elle aurait tout gâché. Aujourd’hui c’est différent, il faut juste que je la regarde pousser cette peau qui m’envahit, qui m’étouffe en silence, toujours sans rien dire vraiment...

Isabelle Gressier - Printemps 2021

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Trop de peau - autoportrait

a été publié dans le n°10 de la Revue FemmesPHOTOgraphes

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Diptyque

Résidence à La Mètive, Creuse 2006

à Karine

À ma mère - 2001

Tirage sur Duratrance, 2,40m x 1,50m

Dos - 2000

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